Voilà presque vingt années que Aegrus existe et une bonne dizaine qu’il me régale de son black acéré, mélodique et inspiré par le malin. Vingt ans donc, quatre EP et quatre albums avec ce « Invoking the Abysmal Night » ; avec ces finlandais nous n’avons donc pas affaire à des débutants mais à un groupe désormais bien établi au sein de la scène black metal.
Honnêtement, et pour ce qui me concerne, la discographie du groupe ne souffre d’aucune faiblesse. Avec Aegrus on est sur du classique, du solide qui ne surprend peut-être pas énormément mais qui ne déçoit pas. De « Devotion for the Devil » à ce nouvel opus, c’est un sans faute ou un quasi sans faute. Passé tour à tour chez Drakkar Productions, Purity Through Fire, Saturnal Records, Aegrus est signé depuis quelques années chez Osmose Production où il a déjà sorti l’EP « The Carnal Temples » en 2022, voilà donc, là aussi, un parcours des plus flatteurs.
« Invoking the Abysmal Night » se révèle à nous avec un très bel artwork de Helgorth qui avait déjà réalisé celle du précédent EP. On pourrait le trouver un peu sophistiqué, moins « true » peut-être, mais on ne peut nier que voilà une œuvre graphique belle comme le diable que ce personnage encapuchonné semble invoquer.
C’est d’ailleurs là une autre des récurrences du groupe que d’évoquer les contrées lucifériennes. Un rapide coup d’œil sur la tracklist vous convaincra que, non, Aegrus n’a pas renoncé au Malin qui reste un des fils conducteurs principaux de sa discographie.
Mais venons-en à ce qui devrait vous intéresser le plus : la musique. Comme évoqué plus haut, il n’y a guère de place pour la déception dans l’œuvre de Aegrus et ce n’est pas avec « Invoking the Abysmal Night » que cela va commencer.
Ce qui peut surprendre (peut-être) c’est la production de l’album qui sonne plus « propre » que sur les précédents opus. Toutefois, l’EP « The Carnal Temple » avait déjà pu donner un petit indice sur cette évolution vers un son plus abouti. « Invoking the Abysmal Night » enfonce le clou et sonne comme un album résolument moderne tout en préservant son cachet originel. Il y aura peut-être ici source à débat : les uns se félicitant de cette mue là où d’autres auront un petit pincement en repensant à « Devotion for the Devil ». Honnêtement au bout de tant d’années de dévotion au black metal, il ne me semble pas anormal qu’un groupe ressente le besoin d’avancer. Cela est d’autant plus vrai que les compositions n’auraient pas mérité un autre traitement, car c’est l’énorme point fort de « Invoking the Abysmal Night » que de proposer sept titres ciselés mais néanmoins féroces.
Que ce soit au niveau du riffing, des mélodies, du chant et de l’ensemble de l’instrumentation, Aegrus est parvenu ici à un degré de maîtrise et d’inspiration tout à fait remarquable. Chaque composition fait mouche tout en se distinguant les unes des autres. On reste sur un black ultra mélodique des plus classiques dans sa forme mais c’est tellement bien fait et prenant que ça a le goût de la nouveauté. Les quarante minutes passent comme un souffle et ne souffrent d’aucune espèce de longueur. Les amateurs de rythmes emmenés et de breaks ravageurs ne pourront que succomber aux assauts de « Followers of the False Prophets » ou de « Through Devil’s Breath ». Des accents plus cérémonieux ressortent de « Invoking the Abysmal Night » ou de « Temple of Ardent Worship » mais sans jamais se départir de ces mélodies et d’un chant possédé. Le groupe sait aussi varier les plaisirs, voire surprendre, sur le break de « Nocturnal Rites of Faust ».
Mes titres favoris restent probablement les deux derniers. En effet « Those Who Hide from Light » et « Where the Forest Emanates Death » développent une richesse d’ambiances très à propos pour conclure un album. Les atmosphères qui s’en dégagent sont à la fois épiques et majestueuses, les mélodies (toujours elles) tutoient parfois le pagan voire le cosmique, dégageant un côté des plus saisissants.
Alors si vous n’avez pas eu l’occasion de jeter une oreille sur ce nouvel album de Aegrus, il n’est jamais trop tard pour bien faire. Ce serait même infiniment dommage pour parler franchement. Un album à recommander à ceux et celles qui aiment le black metal mélodique et classique avec cette once d’audace et d’inspiration qui fait toute la différence.
Tracklist :
1. Invoking the Abysmal Night (05:12)
2. Followers of the False Prophets (05:28)
3. Through Devil’s Breath (03:45)
4. Temple of Ardent Worship (05:39)
5. Nocturnal Rites of Faust (07:07)
6. Those Who Hide from Light (05:50)
7. Where the Forest Emanates Death (07:57)
Line-up : Praestigiator – Guitares / Lux Tenebris – Guitares, basse, chant (backing) / Inculta – Chant, batterie / Serpentifer – Batterie.
Liens :
https://www.facebook.com/Aegrusofficial/
https://open.spotify.com/intl-fr/artist/5WEzVMitX4GcviC5NTH3bX