Originaire du Kirghizistan mais désormais établi en Allemagne, le groupe Darkestrah n’est pas le premier venu en matière de black pagan folk. Dans les faits, ses membres ont diverses origines (notamment l’Iran pour Charuk, la chanteuse, et Magus qui s’occupe des instruments traditionnels) mais l’Asie Centrale constitue la terre dans laquelle la musique de Darkestrah s’enracine.
Actif depuis 1999, «Nomad» constitue son septième album. Jusque-là, la formation a été cantonnée à des sorties plutôt discrètes et touchant un public de connaisseurs. Cet état de faits n’enlève rien aux qualités du groupe et ce statut devrait enfin pouvoir changer, puisque cette fois ce nouvel album sort chez Osmose Productions. Alors sans dire que cette signature sera une clef vers le succès, gageons qu’elle offrira à ce groupe une exposition et reconnaissance plus larges. Et disons le : à l’écoute de «Nomad», ce serait amplement mérité !
Voilà en effet un album de black pagan ou de black folk entièrement à ma convenance : suffisamment folk pour avoir son identité sonore et culturelle, mais pas trop non plus, ne tombant pas ainsi dans un folklorisme parfois excessif et souvent inhérent au genre.
Prenant son temps, en s’ouvrant sur des atmosphères chamaniques, le groupe commence par évoquer le village kirghize de Kök-Oy. Le morceau est assez classique dans son instrumentation mais son côté épique et mélodique est déjà des plus séduisants. On relèvera aussi la prestation de la chanteuse qui est tout à fait prenante, avec ses inclinaisons à la fois de guerrière et de magicienne.
Mais la plus belle partie du voyage est encore devant nous et cela commence véritablement avec le titre éponyme qui s’ouvre sur des notes de temir komuz, instrument de bouche proche de la guimbarde. Ces sonorités, qui ne sont pas sans évoquer les Ouraliens de Всполох, se marient à des arrangements de cordes presque cinématographiques. L’ensemble est vite épaulé par un chant et des guitares acérées qui donnent à ce morceau un contraste tout à fait saisissant pour neuf minutes d’un voyage sans temps mort.
La cavalcade au cœur de l’Asie Centrale se poursuit de plus belle avec « Destroyer of Obstacles » et toujours ce mélange de black très tranchant et de sonorités traditionnelles aux arrangements subtils. On reconnaîtra cette fois des notes de tar ou de divan qui donnent au titre toute sa dimension orientale.
Cet agréable équilibre, Darkestrah parvient à le tenir tout au long de l’album que ce soit à travers des morceaux d’épopée comme «Quest for the Soul» ou sur des ambiances plus chamaniques sur le morceau «The Dream of Kojojash» inspiré d’un récit de la tradition kirghize. Fermant l’album de la même manière qu’il s’est ouvert, «A Dream That Omens Death» distille une dernière fois quelques notes mystérieuses.
Ancré aussi bien dans un black metal épique que dans des sonorités typiques de l’Asie Centrale, Darkestrah délivre un album qui mérite l’attention. Porté par un esprit combatif puisé aussi bien dans la force des esprits que dans l’histoire, «Nomad» est un album conquérant. En tout cas, moi, il m’a conquis.
Tracklist :
1. Journey Through Blue Nothingness (02:12)
2. Kök-Oy (08:00)
3. Nomad (09:35)
4. Destroyer of Obstacles (09:32)
5. Quest for the Soul (09:46 )
6. The Dream of Kojojash (04:59)
7. A Dream That Omens Death (01:45)
Line-up : Asbath – Batterie, Percussion, temir komuz / Resurgemus – Guitares, claviers / Cerritus – Basse, tambour de shaman, temir komuz / Magus – Tambour, Divan, Cuatro, tar azeri / Charuk – Chant, percussions.
Liens :
https://darkestrahofficial.bandcamp.com/
https://www.deezer.com/en/artist/195268
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